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Une autre image de la maternité

Vendredi 02 Juin 2023

Les années 1920 sont pour María Blanchard celles du retour à la figuration. Abandonnant le cubisme, elle se concentre sur des scènes du quotidien à l’émotion puissante.


Aux couleurs sombres et estompées, ce pastel offre une vision émouvante et puissante d’une Maternité moderne. Le regard de cette femme, protégeant son enfant endormi sur ses genoux, nous interpelle. María Blanchard réalise là l’une de ses œuvres les plus abouties des années 1920. Si la peintre abandonne alors le style cubiste, elle en conserve une construction puissante et des formes géométrisées. Difficile également de ne pas évoquer l’héritage de la tradition picturale espagnole dans cette composition où le noir domine. Une œuvre qui ne laisse pas insensible. Elle provient d’ailleurs de la famille de Paul Claudel, sans doute de son fils, et a été conservée au dépôt du musée de La Piscine de Roubaix jusqu’au 27 janvier dernier, aux côtés d’une autre Mère à l’enfant aux accents cubistes et de 1924. Paul Claudel fut l’un des plus célèbres amateurs de la peinture de l’artiste espagnole. Il lui consacra d’ailleurs un de ses poèmes dans son recueil Visages radieux, en 1931. Il faut dire qu’elle fut une artiste à part, admirée de tous. Atteinte de nanisme et de déformation physique, María Blanchard dut faire face toute sa vie à la discrimination. Et pourtant, cela ne l’empêcha pas de se lancer, comme femme, dans le milieu qu’était l’art à cette époque. Née à Santander d’un père espagnol et d’une mère franco-polonaise, elle étudie avec les encouragements de sa famille à Madrid. C’est grâce à une bourse qu’elle se rend pour la première fois à Paris en 1909, où elle s’inscrit à l’académie Vitti, y suivant les cours de Van Dongen, puis à celle de Marie Vassilieff. Après un retour dans son pays entre 1913 et 1916, elle revient en France, où elle subit alors l’influence majeure du cubisme, qu’elle retranscrit surtout dans des natures mortes. Amie de Picasso et Gris, elle devient également l’une des protégées du marchand Léonce Rosenberg. Mais bientôt, la figure féminine s’impose dans son travail au début des années 1920, époque artistique marquée par un « retour à l’ordre », dans un traitement plus figuratif et expressionniste. La spiritualité de ses dernières œuvres évoque par ailleurs la place de plus en plus grande accordée à la religion dans les dernières années de sa vie.

DIMANCHE 11 JUIN, MONTPELLIER-CASTELNAU-LE-LEZ.



María Blanchard (1881-1932), Maternité, pastel sur papier, 97 x 70 cm à vue.
Estimation : 30 000/50 000 €

Par Caroline Legrand